LES
ACTIONS DE FRED FOREST
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Internet
Installation
BIENNALE DE L'AN 3000
MAC (Musée d'Art Contemporain) de Sao Paulo
2006
La Biennale de l'An 3000 une Biennale PLANETAIRE, PARTICIPATIVE
ET DEMOCRATIQUE. Des critiques d'art réunis à Paris
pour leur Congres International en octobre 2006 l'ont déja
reconnus: au-dela de la 27e Biennale officielle qui en a été
le point de fixation, la Biennale 3000 de Sao Paulo met en interrogation
critique les circuits de l'art contemporain et leurs fonctionnements.
Quelques jours après son lancement en 2006, l'action Biennale
3000, conçue et réalisée par Fred Forest, simultanément
à la 27eme Biennale officielle de Sao Paulo, a pu être
considérée comme un succès particulièrement
significatif. Il est a noter que ce projet va continuer à
se développer dans le temps, sans autres limites que celles
décidées par Fred Forest et les internautes Du fait
de la communication virale induite par l'artiste sur Internet par
ses propres réseaux de communication, ce " succès
" ne peut encore que prendre une ampleur et une dimension plus
importante.A l'heure actuelle plusieurs milliers de participations
se sont manifestées avec des envois qui émanent, bien
sûr, du Brésil et d'Amerique Latine, mais aussi de
France, du Portugal, du Canada, de Belgique, d'Italie, de Slovenie,
d'Autriche, de Pologne etc. Des peintures, des dessins, des photos,
des vidéos, des performances, des sculptures, des poémes
et une réflexion théorique sur l'art, témoignent
d'une large diversité des disciplines représentées,
comme de leurs contenus.
Certes, on peut constater que la participation s'avère massive,
mais ce qui retient au premier chef l'attention c'est, d'une façon
globale, la "qualité" en elle-même des oeuvres
proposées par les internautes ! L'expérience de Fred
Forest constitue une expérience originale et enrichissante
dans la mesure où elle nous fait nous interroger d'une façon
dubitative, en matière d'art contemporain, sur la pertinence
du jugement des " experts " (les commissaires de Biennales
et autres manifestations du même genre) qui décident
arbitrairement, refusent ou ignorent, des artistes candidats dont
le seul désir légitime est de pouvoir présenter
leurs oeuvres au public.
Le denier Congrès International de l'AICA (Association Internationale
des Critiques d'Art) qui s'est déroulé en novembre
2006 à Paris, entérine, de facto, une crise de la
profession, devant une difficulté de selection, sans cesse
grandissante. Le congrès note un déplacement de plus
en plus marqué de l'esthétique vers le sociologique,
voire l'anthropologique. Le problème que souligne Forest,
qui par ailleurs est Docteur d'Etat de la Sorbonne, donc fondé
de pouvoir porter une appréciation sur cette situation, au
même titre qu'un commissaire de n'importe quelle exposition
officielle, c'est que l'omniprésence du marché, aussi
bien à Sao Paulo, qu'à la documenta de Kassel, la
Biennale de Venise ou la FIAC de Paris, contribue à des partis
pris et des choix qui sont sous son influcence directe ou indirecte
du circuit marchand. C'est donc, au final, l'économie et
la finance qui, en dernier ressort, déterminent et légitiment
quelles sont les valeurs symboliques dans notre société
actuelle, et non pas ce qui relève du jugement esthétique.
Pour aller vite, on pourrait dire alors que ce n'est plus Kant qui
en decide, ou Artur Danto, mais bien Bill Gates aujourd'hui, et
Google demain ! Si la 27e Biennale officielle recours à Roland
Barthes pour légitimer son concept fondateur, en matière
d'emprunt à la réflexion universitaire française,
elle aurait pu tout aussi bien se référer, a contrario,
à un autre philosophe français, Jean Baudrillard,
qui, pour sa part, a eu l'occasion de dénoncer l'art contemporain
comme une imposture majeure.
Le second point à souligner, c'est comment l'action de Forest
met en évidence l'echec de cette 27e Biennale 2006 qui prétendait
bien imprudemment, à grands renforts d'effets d'annonces
et de colloques préparatoires, être une biennale populaire,
périphérique, éclatée etc... Son échec
de ce point de vue est édifiant, et ce n'est pas deux ou
trois collectifs politico-syndicalistes utilisés ici comme
alibis qui sont en mesure de sauver la face.. Lisette Lagnado est
beaucoup trop intelligente pour ne pas savoir que la question de
l'art n'est pas une question de bons sentiments mais d'éducation,
de milieu social et de transformation des superstructures, comme
l'aurait dit Marx. En l'occurence ce n'est pas un philosophe du
college de France, mort de surcroit, qui pourra y changer quelque
chose mais, en toute hypothèse, un politique de la trempe
de Lula, si toutefois son entourage ne le fait pa chuter du haut
de son piedestal avant l'heure (?)
L'action de Fred Forest vise par une démonstration critique
à montrer, d'une part l'arbitraire du choix des participants
dans les Biennales officielles, et, d'autre part, à demontrer
que les réseaux d'Internet et leurs espaces virtuels, sont
en mesure de constituer une alternative qui, avec le numérique,
nous conduit vers un changement de culture inexorable. Dans l'action
imaginée par Forest des artistes reconnus et importants ont
pris la peine de manifester leur présence. C'est le cas par
exemple d'Eduardo Kac, Clémente Padin, Maurice Benayoun,
Miguel Chevalier, Lucas Bambozzi, Gilbertto Prado, Roland Baladi,
Roland Sabatier, Jean-Noel Laszlo et des dizaines d'autres encore.
Mais il y a aussi dans la Biennale 3000 de nombreux artistes présents
qui n'ont jamais été invités par une Biennale
quelconque, et dont l'intérêt manifeste que présente
leur production n'a rien à envier à tout ce qu'on
peut voir dans les galeries de New York, de Londres, de Milan ou
de Berlin, ou même certains musees d'art contemporain qui,
souvent, se contentent de suivre le mouvement et d'emboiter la pas
au marché. Un marché qui sous forme du marketing culturel
fait et défait les valeurs et les réputations, en
fonction de manipulations boursières.
L'artiste démontre avec cette Biennale 3000 que des voies
alternatives s'ouvrent à eux maintenant qu'ils sont en mesure
d'utiliser, eux-mêmes les technologies de communication.
Vainement Fred Forest a réclamé de Lisette Lagnado,
la commissaire générale de la Biennale officielle,
et en tout courtoisie, la possibilité d'organiser avec elle
un débat public sur ces questions. Mais la seule réponse,
du commissaire de la 27 eme Biennale, à ce jour, est un refus
par un silence embarrassé et prudent.
Enfin, pour terminer, il faut dire que Fred Forest a implanté
une installation dans le MAC (Musee d'art Contemporain de Saop Paulo)
sous forme d'un dispositif par lequel sa Biennale de l'An 3000,
d'une façon minimaliste permet par un tout petit trou de
découvrir l'immensité du monde. L'immensité
d'un monde infini, où les images, les sons, les paroles,
les vidéos, se propagent désormais à travers
un espace virtuel que l'art actuel s'approprie . Si la 27eme Biennale
officielle de Sao Paulo ne présente pas une seule installation
raccordée a Internet, Fred Forest vient de démontrer,
quant à lui, qu'il a parfaitement réussi la Biennale
populaire, péripherique et éclatée que la Biennale
officielle aurait tant voulu réaliser. Il faut espérer
que riche de cet enseignement que lui donne un artiste la Biennale
officielle réussira son pari en l'an 3000...
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