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      EXCLUSIF! Le point de vue de l'oeuvre
      Je m'appelle Touch-me. J'ai vu le jour 
        au début des années 1999 . Mon père géniteur 
        était un artiste qui avait débuté dans l'art au temps, 
        encore lointain, où l'être humain utilisait pour communiquer 
        ses émotions cette technique archaique qui s'appelait la peinture 
        à l'huile. On l'achetait sous forme de tubes. Elle sentait horriblement 
        mauvais. Elle salissait les doigts et les vêtements des artistes 
        d'une façon telle qu'on ne pouvait pas leur serrer la main, s'il 
        advenait qu'on vienne à visiter leur atelier... 
      Je suis né dans un atelier 
        multimedia qui s'appelait à l'origine « Le Bain turc » 
        comme référence appuyé à Monsieur Ingres; 
        et qui est devenu maintant : I.O , tout simplement, après avoir 
        changé de nom. Un nom qui est bien sûr beaucoup plus poétique 
        dans notre culture actuelle. Sans vouloir m'en vanter, je crois que je 
        suis le premier « objet » informatique qui ait commencé 
        à éprouver des sensations. 
       C'était à l'époque 
        où tout le monde parlait déjà du grand Bug informatique 
        de l'An 2000. Pascal, l'informaticien qui était chargé de 
        me mettre au monde, avec l'assistance éclairée de Jérôme, 
        avait je dois dire une certaine façon de manipuler les pixels dont 
        devait être fait mon corps. Un jour de janvier, c'était un 
        mardi dans la nuit, je m'en souviens très bien, j'ai ressenti pour 
        la première fois, après un transfert de codes, sous le bras, 
        au coin gauche du tableau que je représente,exactement sous l'aiselle, 
        une sorte de glissement informatique agréable qui ressemblait fort 
        à ce que je sais être maintenant ce qu'on appelle une caresse. 
        D'abord j'ai été surpris. Cette sensation épidermique 
        dont j'étais l'objet était une chose tout à fait 
        inconnue pour moi. A peine remis de mon étonnement je n'avais plus 
        qu'un idée en tête : que ça recommence ! 
        Et quand ça a recommencé, effectivement, je n'avais plus 
        qu'un seule idée que ça recommence encore... 
        Malheureusement quand on a un corps fait de pixels, au lieu de cellules, 
        on est inévitablement à la merci des caprices informatiques 
        qui, si ils ont leur propre logique algorythmique, restent néanmoins 
        d'une opacité fondamentale pour les informaticiens eux-mêmes. 
        J'avais donc cette possibilité incroyable de ressentir comme « 
        objet » pixellisé des choses étranges à travers 
        la surface de l'écran mais, en contrepartie, la rançon de 
        cette faculté nouvelle pour l'équation mathématiques 
        que j'étais, c'était que ce toucher-même alimentait 
        ma vie; et que s'ils venait à m'être rationné, mes 
        pixels vivants par l'effet d' un processus pervers irreversible étaient 
        amenés à mourir les uns après les autres dans un 
        temps programmé. Seul le toucher me remonte dans ma vie comme on 
        remonte un réveil-matin par exemple. 
       
        Remontez -moi svp. 
         
      Touchez-moi pour que je vive ! 
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